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Louis (Seurvat) Vasseur (1858 – 1932) est né à Noyon. Ce n’est qu’après son arrivée à Ailly-sur-Noye où il s’établit comme notaire en 1885, qu’il commence à parler le picard : “Séduit par l’originalité et le pittoresque des expressions, la variété des cadences, l’harmonie imitative, la bonhommie railleuse et l’énergie du dialecte picard que j’entends parler autour de moi surtout depuis que les circonstances m’ont conduit en pleine Picardie, j’ai appris presque inconsciemment d’abord, subissant ‘influence d’un milieu qui me plut, et volontairement ensuite (…) à parler le picard”. Les premiers textes publiés de Seurvat date de 1902.

Cho n-n’est
Ce poème représente sans doute le nec plus ultra de la littérature stercoraire : il semble difficile d’aller plus loin ! Ici, le comique rejoint le cosmique, l’espace libre, et nous voilà “n’importe où, hors du monde’’, selon la formule de Poe, — Pisqu’i n-y’avoit ni ciel ni terre.

 

Tiot Bâtisse et ch’cousin François,
A torche ed tiots pouts pis d’grosses gouttes,
D’chez ch’débitant ronds conme des pois,
Pour s’n’aller jouquer s’mettent én route.

Conme o n’voyoit én braque én yux,
Surtout én sortant del leumière,
ls zigzagoittent à qui miux miux,
Pisqu’i n-y’avoit ni ciel ni terre.

 

Tiot Bâtisse, qui marchoit ch’premier,
Das un royard toit ène glichade
En tornant ch’cuin d’ech cabar’tier,
Pis cait mort-z-ive à l’palissade.

Prénd d’ène tranchée, ch’cousin François
(Vu qu’nécessité n’o pos d’Ioi),
Es’ déboutonne,
Et pis s’aponne…
Soulagé, i porsuit sén qmin
Tant bién qu’mal, sains pénser à rién,
Ni s’occuper d’sén camarade,
Qu’il avoit erchu sn’éclichade.

 

Chti-chi, au bout d’un tiot momént,
Es’ réveille et pis ’rprénd ses séns.
I s’tâte, conme un honme qui s’dégrise…
Et met ses mains das l’marcandise.

“Cho n-n’est ! qu’i s’écrie, nom dé zeu !
“Ej n’ai point d’sanche !
“Qu’o z-est-i bête quand o z-est seu :
“J’ai quié sus m’panche !”